Les députés approuvent la création d'un statut unique de praticien hospitalier
Les députés ont entamé, depuis lundi après-midi, l'examen en séance publique du projet de loi "relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé", qui comprend désormais 45 articles après son passage en commission (cf dépêche du 15/03/2019 à 15:59). Plus de 2.000 amendements ont été déposés sur ce texte, dont l'examen devrait s'achever vendredi, avec un vote solennel programmé mardi 26 mars.
L'article 6 du projet de loi habilite le gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les mesures visant à "adapter les conditions d’exercice et les dispositions relatives aux statuts" des personnels médicaux et pharmaceutiques et des professionnels enseignants et hospitaliers, ainsi que de ceux des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).
Les députés ont adopté l'article et repoussé, avec l'appui de la majorité LREM, plusieurs amendements de suppression émanant de l'opposition qui regrettait une réforme par voie d'ordonnance.
Il s’agit d’abord de "faciliter la diversification des activités entre l’activité hospitalière publique, des activités partagées entre structures de santé ou médico-sociales et un exercice libéral, dans leur établissement ou non, pour décloisonner les parcours professionnels et renforcer l’attractivité des carrières hospitalières".
Les mesures visent aussi à "simplifier et adapter les conditions et les motifs de recrutement par contrat pour mieux répondre aux besoins des établissements, notamment dans les spécialités où ces derniers rencontrent le plus de difficultés à recruter et pour faciliter l’intervention des professionnels libéraux à l’hôpital", dispose le texte.
L’objectif poursuivi "est de renforcer l’attractivité de l’exercice sous statut hospitalier", explique le gouvernement dans l’exposé des motifs.
L’article réforme "les conditions de recours à l'emploi médical contractuel dans le cadre d'un nouveau contrat, se substituant à plusieurs formes existantes qui seront supprimées, afin de permettre aux établissements de disposer de modalités plus adaptées à leurs besoins de recrutement", est-il ajouté.
Une concertation se poursuivra jusqu'à l'été
"Cette mesure participera de la simplification du code de la santé par la suppression qui en résultera de 5 statuts remplacés par 2 statuts, un de titulaire, un de contractuel", selon le ministère des solidarités et de la santé.
Les statuts concernés sont les suivants:
praticiens contractuels, "cliniciens" et adjoints contractuels (9.932), praticiens attachés (20.663)
professeurs des universités-praticiens hospitaliers (PU-PH) et maîtres de conférences des universités-praticiens hospitaliers (MCU-PH)
praticiens hospitaliers universitaires (PHU)
chefs de clinique universitaires-assistants des hôpitaux (CCU-AH) et assistants des hôpitaux universitaires (AHU).
Dans l’étude d’impact, le ministère dénombrait 49.846 praticiens hospitaliers (effectif physique) sur le territoire métropolitain et dans les départements d’outre-mer, dont 44.305 PH temps plein (89%) et 5.541 praticiens hospitaliers temps partiel (11%).
Les PH sont astreints à des obligations de service qui s’élèvent à 10 demi-journées hebdomadaires pour les PH à temps plein et entre 4 à 6 demi-journées PH à temps partiel, est-il rappelé dans l’étude d’impact. Les PH à temps plein ne sont pas autorisés à réaliser une activité extérieure à l’établissement (exercice en ville).
Cette refonte du statut de praticien hospitalier d’ici 2020 avait été annoncée par l’exécutif en septembre 2018, dans le cadre de la stratégie "Ma santé 2022" (cf dépêche du 18/09/2018 à 14:32). Le ministère avait alors précisé que l'entrée dans la carrière serait simplifiée, avec une suppression du concours de PH.
"Le périmètre des catégories de personnels concernés par ces mesures nécessite de procéder à une consultation de l’ensemble des organisations représentatives des personnels et des représentants des employeurs", selon l’étude d’impact.
L'article donne à l’exécutif un an pour prendre l’ordonnance à compter de la publication de la loi. Le projet de loi de ratification devra être déposé dans un délai de 3 mois suivant cette publication.
La ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn, a précisé que les concertations préalables avec les acteurs concernés devraient s'achever "avant l'été".
Elle a justifié la suppression du concours actuel, soulignant qu'il s'agissait d'un "faux concours".
"On regarde le CV des gens, leur formation, leurs titres et travaux. Cela mobilise énormément de temps pour 95% d'admis. Donc on préfère regarder les titres et travaux sans mobiliser le ban et l'arrière-ban des PH pour faire passer ce pseudo-examen, on supprime le concours mais on garde une période probatoire d'un an pour s'assurer que ceux que l'on recrute ont bien les compétences et s'intègrent dans l'équipe", a expliqué Agnès Buzyn.
Le statut unique mixte permettra d'avoir une activité en dehors de l'hôpital, a rappelé la ministre. "On a tellement de mal à recruter des anesthésistes par exemple [...]. On se dit qu'on a peut-être plus de chances d'en recruter en leur permettant d'exercer une journée par semaine en clinique pour mettre du beurre dans les épinards, tout en travaillant quatre ou cinq jours à l'hôpital", a développé la ministre.
L'objectif est d'éviter que des médecins "aient à choisir définitivement, pour le reste de leur vie, entre un exercice libéral et hospitalier, pour ceux qui choisiraient de s'inscrire dans un exercice mixte", a-t-elle souligné.
Un exercice mixte pour les professions paramédicales
Les députés ont par ailleurs adopté avec l'aval du gouvernement et à la quasi-unanimité des amendements du groupe LREM et de plusieurs députés Modem autorisant les professions paramédicales à avoir un exercice mixte, en permettant aux établissements de recruter sous statut des fonctionnaires à temps non complet.
Les masseurs-kinésithérapeutes oeuvrant dans la filière de rééducation sont les principaux visés, a souligné le député Cédric Isaac-Sibille (Modem, Rhône), qui défendait la mesure.